Memotransfront - Stätten grenzüberschreitender Erinnerung
   
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Laurent Commaille

Les Houillères du Bassin de Lorraine

Ancien siège, 2, Rue de Metz, Freyming-Merlebach

Les Houillères du Bassin de Lorraine (HBL) constituèrent, de 1946 à nos jours, une des principales composantes des Charbonnages de France. À partir de la nationalisation du 1er juillet 1946, les mines de Lorraine s’inscrivent dans une gestion nationale. Cependant, la vie du bassin reste dépendante des conditions locales d’exploitation et de l’héritage des anciennes sociétés minières. La mise en exploitation tardive (par rapport au nord de la France) du charbon lorrain avait débouché sur la constitution d’un nombre réduit de sociétés exploitant chacune un secteur bien précis d’une zone charbonnière relativement peu étendue. La sagesse fut de reprendre l’ancienne division de l’espace à l’intérieur de la nouvelle organisation. C’est ainsi que quatre groupes furent créés : Petite-Rosselle, qui reprit les sièges de de Wendel, Freyming-Merlebach qui reprit ceux de la société Sarre-et-Moselle, Faulquemont et Folschwiller qui fusionnèrent assez vite. C’est surtout pour Petite-Rosselle et Freyming-Merlebach que le maintien des anciennes divisions se fit sentir, Faulquemeont et Folschwiller étant des sièges trop récents.

Petite-Rosselle, c’est la tradition de Wendel, une certain dirigisme, une certaine rigueur voire pesanteur de pensée, des mineurs prioritairement recrutés dans le terroir mais aussi des habitudes paternalistes, un souci de la vie personnelle du mineur favorisés par la continuité de l’entreprise. Le siège de Freyming-Merlebach eut une histoire plus mouvementée. Il est l’héritier de l’entreprise Sarre-et-Moselle constituée dans l’entre-deux-guerres à partir des sociétés à capitaux allemands nées pendant l’annexion, La Houve (comprenant aussi des fonds français) et Saar-und-Mosel, cette dernière ayant d’ailleurs pris la suite d’une Sarre-et-Moselle à capitaux franco-belges. Développée au début du siècle par les investissements des grands sidérurgistes Thyssen et Stinnes, la société passe aux mains d’intérêts essentiellement du nord de la France dont vinrent alors une grande partie des cadres pour remplacer ingénieurs et porions allemands. Le développement plus tardif de Saar-und-Mosel lui imposa un recrutement de main d’œuvre plus ouvert que celui de Petite-Rosselle où l’élément allemand fut important, qu’il vienne de la Ruhr ou de la « Sarre » voisine. Dans les années vingt, les Polonais vinrent combler les vides laissés par les départs des mineurs allemands. C’est le siège de Sarre-et-Moselle qui abrita l’administration centrale des Houillères du Bassin de Lorraine, peut-être à cause de la trop forte personnalité des mines de Petite-Rosselle. Les conditions idéologiques et matérielles propres à l’immédiat après-guerre, le plan Monnet – il propose de passer de 26000 tonnes par jour à 63000 –, laissent entrevoir de vastes perspectives de développement pour le charbon lorrain, deuxième pôle houiller de France. D’autre part, le statut particulier de la Sarre permet d’imaginer des transferts de main d’œuvre avec les sièges sarrois et des possibilités d’extension des fronts de taille sous le Warndt. Malgré les accords de 1946, les mineurs sarrois prennent peu le chemin des HBL (un millier seulement alors) et l’évolution de la Sarre limite les extensions des HBL en direction du bassin sarrois. Le traité franco-allemand de 1956 sur la Sarre prévoit un abandon progressif des amodiations de 1924 (Karlsbrunn) et 1927 (Großrosseln), renouvelées en novembre 1949. Ce retrait doit se faire en trois tranches, la première intervenant en 1962 et la deuxième en 1972. Compte tenu de l’évolution des Houillères, la fin de l’exploitation du sous-sol sarrois du Warndt, repoussée à 2006, coïncidera pratiquement avec la fermeture des derniers puits des HBL La mise en place de la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier a un moment paru bloquer l’avenir du charbon lorrain concurrencé par des houilles de meilleure qualité et plus facilement commerciables. Il a fallu les efforts considérables des années cinquante pour la valorisation de la houille lorraine pour que le bassin lorrain puisse croire en son avenir. La construction de la plate-forme carbo-chimique de Carling (1952–1956), de centrales thermiques (Émile Huchet 1952, Grosbliederstroff 1954), des progrès sensibles dans les rendements font, à l’orée des années soixante, des HBL le fleuron des Charbonnages de France. Mais, dès lors, les jours du charbon sont comptés face à la concurrence du pétrole. Le plan Bettencourt de 1968 prévoit une baisse de 3 millions de tonnes (Mnt) de l’extraction de charbon par an. En 1972, le puits de Sainte-Fontaine est fermé, en 1974 celui de Faulquemont et en 1977 celui de Folschwiller. La production est tombée à 9 Mnt en 1974. La crise pétrolière et l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981, une gauche encore attachée culturellement au volontarisme économique et aux anciennes industries, font espérer une reprise de l’extraction. Celle-ci remonte en effet à 10,8 Mnt en 1984, au moment où se fait la conversion économique du Parti socialiste, l’abandon des objectifs socialo-communistes issus du Programme commun de la Gauche. C’est le chant du cygne de la production charbonnière lorraine, incarnant désormais seule l’histoire des charbonnages après la fermeture des autres sites nationaux. Restent de cette aventure quelques installations de surface dont certaines sont reconverties en patrimoine industriel (le Carreau Wendel) et des cités ouvrières couvrant à peu près toute l’histoire du Bassin houiller de Lorraine, des cités du Puits Saint-Charles édifiées dans les années cinquante du XIXe siècle par de Wendel aux grands collectifs des années cinquante du XXe (Behren-lès-Forbach, inauguré en 1962) sans oublier les essais de cités-jardins des années vingt et les mutations récentes des anciennes cités (Ste Barbe à Freyming-Merlebach).

Évolution de la production de charbon (en millions de tonnes) :

1948 6

1952 12,2

1957 14,97

1963 13,2

1964 15,6

1968 13,8

1970 12,8

1972 10,9

1974 9

1984 10,8

 

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Memotransfront - Stätten grenzüberschreitender Erinnerung Rainer Hudemann unter Mitarbeit von Marcus Hahn, Gerhild Krebs und Johannes Großmann (Hg.): Stätten grenzüberschreitender Erinnerung – Spuren der Vernetzung des Saar-Lor-Lux-Raumes im 19. und 20. Jahrhundert. Lieux de la mémoire transfrontalière – Traces et réseaux dans l’espace Sarre-Lor-Lux aux 19e et 20e siècles, Saarbrücken 2002, 3., technisch überarbeitete Auflage 2009. Publiziert als CD-ROM sowie im Internet unter www.memotransfront.uni-saarland.de.