Memotransfront - Stätten grenzüberschreitender Erinnerung
   
    Version imprimable (PDF)    
 

François Roth

« La Colline inspirée », Sion-Vaudémont

Ce haut-lieu, détaché de la côte de Meuse dont il est une butte-témoin, culmine à 542 m. Au-dessus de la plaine du Saintois d’où on l’aperçoit jusqu’à quarante kilomètres à la ronde. Son occupation humaine est très ancienne.

Sur le flanc sud subsistent quelques vestiges de murs et d’une tour (Tour Brunehaut) datant du XI–XIIe siècle, appartenant à un château-fort construit par le comte de Vaudémont dont est issue la famille ducale de Lorraine.

À l’époque médiévale sur une autre partie de l’éperon est bâtie une église dédiée à la Vierge, qui devient une église de pélerinage. L’Église qui conserve un chœur médiéval du XIVe siècle, récemment restauré, a été reconstruite aux XVIIIe (nef) et XIXe (tour-clocher) siècles. La statue de l’Immaculée-Conception qui la domine, a été placée en 1871. Le pélerinage à la Vierge de Sion qui renaît sous la Restauration, est placé sous la direction de la congrégation des Oblats ; il attire les paysans des alentours et les paroisses de diocèses voisins.

En septembre 1873, les évêques de quatre diocèses lorrains accompagnés de nombreux fidèles se rendent en pélerinage à Sion. Parmi eux se trouve Mgr. Dupont des Loges, évêque de Metz dont le diocèse vient d’être annexé à l’Empire allemand à la suite du traité de Francfort. Lors d’une cérémonie solennelle, on installe dans le chœur du sanctuaire une croix de Lorraine brisée avec cette inscription en patois lorrain : « Ce n’est pas pour toujours ». C’était une condamnation morale de l’annexion de 1871. Dans ce contexte si particulier, le pélerinage marial à Sion se colorait inévitablement d’une signification patriotique.

Au début du XXe siècle, l’écrivain nationaliste Maurice Barrès, qui venait souvent dans sa maison familiale de Charmes et était devenu amoureux de ce haut-lieu, de cette « colline où souffle l’esprit », publie « La Colline inspirée », un roman religieux et culturel où sont réunis tous les thèmes lorrains dont, depuis vingt ans, il s’était fait le chantre inlassable. Barrès a transfiguré Sion en un lieu légendaire et mythique : Sion devient la « Colline inspirée ». On comprend le retentissement du « pélerinage de la victoire » en juin 1920 où la Croix de Lorraine brisée a été réparée par une palme d’or portant cette inscription : « Ce n’était pour toujours ! » En décembre 1923, Maurice Barrès qui avait présidé le « pélerinage de la victoire », décèda subitement ; un comité se constitua pour ériger sur la Colline, une Lanterne des morts en l’honneur de l’écrivain disparu ; elle fut inaugurée en septembre 1928 par le président du Conseil, Raymond Poincaré.

La colline de Sion associe trois fonctions :

– C’est un haut-lieu lorrain qui a été aux origines du duché et l’on vient s’imprégner des vieilles traditions et renouer le présent aux origines, sûrement en les transfigurant et en les recomposant.

– C’est un sanctuaire marial où des générations de fidèles sont venus et viennent encore prier Notre-Dame, des Lorrains certes (comme le rappelle le vieux cantique « Notre-Dame, devant toi tes Lorrains... »), mais aussi des Portugais, des Italiens et des Polonais établis en Lorraine.

– C’est un lieu politique où les Lorrains ont affirmé à trois reprises sous le regard de l’Église catholique en 1872, en 1919 et en 1946, à la fois leur unité (un peu légendaire) et leur appartenance à la nation française. Dépourvues de connotations confessionnelles, les manifestations autour du monument Maurice Barrès relèvent du même registre.

Depuis une quarantaine d’années, a ferveur religieuse a décliné et le nombre des pélerins diminué, les cérémonies patriotiques n’ont plus ni l’éclat ni la fréquence d’antant. En 1973 a été célébré le centenaire du pélerinage de 1873 ; les inscriptions précédentes ont été complétées par le mot « Réconciliation ». Plus récemment, un monument en l’honneur de l’Europe a été érigé sur la Colline, signe d’une réorientation de la symbolique et de la commémoration. Paradoxalement jamais la Colline, ses sites et ses monuments n’ont été aussi fréquentés. C’est pourquoi, le Conseil général de Meurthe-et-Moselle projette de reprendre ce patrimoine monumental, religieux, culturel et naturel de la Lorraine, pour le rendre accessible à tous et mieux le préserver.

Pour en savoir plus

Barrès, Maurice, La Colline inspirée, Paris 1913.

Colson, Jean, Sion-Vaudémont ou la « Colline inspirée », Paris 1978.

Mangenot, Eugène, Sion. Son sanctuaire, son pélerinage, Nancy 1919.

Martin, Philippe, Pélerins de Lorraine, Metz 1997.

La Colline de Sion-Vaudémont, Metz 1994 (Itinéraires du Patrimoine, n° 52).

 

>> Retour en haut de page

   
   
   
Memotransfront - Stätten grenzüberschreitender Erinnerung Rainer Hudemann unter Mitarbeit von Marcus Hahn, Gerhild Krebs und Johannes Großmann (Hg.): Stätten grenzüberschreitender Erinnerung – Spuren der Vernetzung des Saar-Lor-Lux-Raumes im 19. und 20. Jahrhundert. Lieux de la mémoire transfrontalière – Traces et réseaux dans l’espace Sarre-Lor-Lux aux 19e et 20e siècles, Saarbrücken 2002, 3., technisch überarbeitete Auflage 2009. Publiziert als CD-ROM sowie im Internet unter www.memotransfront.uni-saarland.de.